
Photo: Pixabay
L’art du débat est l’un des fondements de nos sociétés démocratiques. Depuis Aristote, on cherche à convaincre l’autre à l’aide des meilleurs arguments. C’est en se confrontant à des positions différentes de la nôtre qu’on obtient une vue d’ensemble plus éclairée de la société. Or, il semble que cette habileté ne soit pas l’apanage exclusif de l’humain, puisque la machine peut désormais débattre avec nous.
Project Debater est une technologie basée sur l’intelligence artificielle (IA) dont le but est de permettre à l’humain de prendre de meilleures décisions. Il s’agit d’une création d’IBM qui voit en elle son prochain grand jalon en matière d’IA.
Contrairement aux assistants vocaux créés pour exécuter des tâches spécifiques, ce robot débatteur explore un territoire différent, celui des conversations plus longues et plus complexes, en développant des arguments impartiaux sur des sujets qui n’ont pas de réponses claires.
En juin dernier, après cinq ans de travail, Project Debater a pu faire une démonstration d’art oratoire contre deux humains. Les sujets de cette joute verbale : l’intérêt d’investir des dollars publics dans la conquête de l’espace, ainsi que l’utilité et la pertinence de la télémédecine. Des thèmes qui n’ont pas été révélés à l’avance aux débatteurs humains, pas plus qu’à la machine qui a été ainsi obligée de puiser dans un vaste corpus de centaines de millions d’articles de journaux et de magazines pour élaborer ses arguments. Et elle savait écouter aussi, pour s’adapter et donner une réponse juste – et parfois même lancer quelques blagues – quand venait le temps de répliquer. Grâce à la conversion de la parole au texte, elle pouvait identifier les concepts clés de l’adversaire et se préparer à les réfuter.
Le résultat ? Dans les deux débats, l’auditoire, composé en partie d’employés d’IBM, a voté en faveur de Project Debater pour la quantité d’information transmise et l’a même trouvé plus persuasif que l’humain dans le second débat. Au final, la machine est impressionnante, même s’il lui reste à raffiner sa rhétorique, son style et sa maîtrise de la culture humaine. Car, pour Aristote, il y a trois choses qui nous poussent à avoir confiance en l’orateur : le bon sens, la vertu et la bienveillance. L’humain a donc encore quelques longueurs d’avance sur l’IA.